
Lors d’un divorce, l’un des points que le juge doit examiner concerne le partage de la prévoyance professionnelle entre époux. Il s’agit d’une obligation légale encadrée par les articles 122 et 123 du Code civil. En principe, les avoirs de prévoyance constitués pendant le mariage sont partagés par moitié. La période prise en compte s’étend de la date du mariage jusqu’au dépôt de la demande en divorce.
Ce mécanisme repose sur une logique d’égalité et de solidarité entre époux, mais la loi prévoit quelques exceptions, strictement encadrées, qui permettent de s’écarter de ce partage automatique.
Un principe quasi automatique… sauf justes motifs
En règle générale, ni les parties ni le juge ne disposent d’une grande marge de manœuvre pour écarter le partage par moitié. Toutefois, la loi permet de s’en écarter lorsque le partage s’avère manifestement inéquitable.
L’article 124a al. 1 CC prévoit que le juge peut, en présence de justes motifs, refuser de procéder au partage ou en réduire l’étendue. La loi évoque, à titre d’exemple, un partage par moitié inéquitable en raison de la liquidation du régime matrimonial ou de la situation économique des époux après le divorce. C’est le cas si un époux a financé l’ensemble des charges du ménage pendant que l’autre poursuivait des études supérieures. Ce dernier pourra ensuite bénéficier d’un meilleur revenu et d’une meilleure prévoyance, en partie grâce à cet investissement. Dans un tel cas, le partage de la prévoyance du premier pourrait être jugé inéquitable. De même, il pourrait être inéquitable de partager l’avoir de prévoyance d’un salarié avec un indépendant dont les revenus sont confortables et qui a constitué un 3ème pilier A, cet avoir n’étant pas partagé en raison de l’adoption du régime de la séparation de biens.
La loi cite également la différence d’âge importante entre les époux comme un juste motif pour déroger au partage par moitié. Si l’un d’eux est nettement plus âgé, par exemple, avec un écart d’au moins vingt ans, il ne disposera plus du temps nécessaire pour reconstituer son avoir de prévoyance. Un écart moindre de dix ans peut aussi être pris en compte dans certaines situations si l’un des conjoints est proche de la retraite.
Une situation choquante qui justifie le refus du partage de la prévoyance
Dans un arrêt qui a fait grand bruit (ATF 145 III 45), le Tribunal fédéral a rappelé que l’exception au partage par moitié ne doit pas servir à réévaluer les rôles joués par chacun durant le mariage. Autrement dit, le juge n’est pas autorisé à modifier le partage par moitié en tenant compte su d’une contribution plus ou moins importante de l’un ou l’autre à la vie commune.
Toutefois, le comportement gravement fautif d’un époux peut, dans des cas extrêmes, justifier un refus de partage. Cet arrêt a permis de clarifier cette question sensible, en retenant que le partage par moitié n’a pas pour vocation de réintroduire le divorce pour faute, mais il peut exceptionnellement tenir compte de situations particulièrement choquantes.
C’est le cas dans cette affaire où le mari avait gravement manqué à ses devoirs familiaux : il n’avait contribué ni aux charges du ménage ni à l’éducation des enfants, avait contracté des dettes personnelles laissées à la charge de l’épouse, exercé un contrôle extrême sur elle, maltraité physiquement et psychologiquement sa famille, et dilapidé le salaire de son épouse au jeu.
Dans ce contexte, le juge a refusé de lui accorder la moitié de la prévoyance de son épouse.
Conclusion
Le partage de la prévoyance professionnelle lors du divorce constitue la règle. S’en écarter suppose des circonstances bien précises, évaluées de façon restrictive. Le comportement de l’un des époux ne suffit pas, sauf si ce comportement s’avère particulièrement choquant.
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